La lune de miel est un voyage romantique au cours duquel les jeunes mariés célèbrent leur union et leur amour. Pas vraiment le moment propice pour la création d'une équipe nationale de football.
Et pourtant, c'est lors de sa lune de miel en Écosse, en 1978, que John McAlery, premier capitaine de la Fédération irlandaise de football, a eu l'idée d'introduire le football – sous sa forme organisée – en Irlande. Inspiré par le beau jeu après avoir assisté à son premier match à Édimbourg, le visionnaire McAlery a commencé à poser les fondations du football dans l'Ile d'Émeraude, tout d'abord en invitant deux équipes écossaises – Caledonians et Queen's Park – à disputer un match exhibition à Belfast.
Les locaux adorent. La deuxième initiative de McAlery est de créer un club de football. Joueur de cricket au Cliftonville Cricket Club, McAlery fonde le Cliftonville Football & Athletic Club, qui reste à ce jour le plus ancien club de football d'Irlande. En outre, McAlery se démène pour donner naissance à la Coupe d'Irlande de football.
Le 18 novembre 1880, la Fédération irlandaise de football voit le jour au Queen's Hotel de Belfast, avec McAlery comme secrétaire honoraire. Les règles du football sont couchées par écrit et dans le compte-rendu de cette réunion historique, McAlery s'enthousiasme : "Si l'esprit des gens présents ici est insufflé à la Fédération qui vient de naître, il en résultera une fédération très solide pour promouvoir le sport que nous venons d'adopter".
L'infrastructure est en place. Reste à faire rouler le ballon. Parmi les trois fédérations de football déjà établies de part et d'autre de la mer d'Irlande, l'Angleterre est choisie comme premier adversaire de l'Irlande. Très bon joueur de cricket et désormais footballeur au Cliftonville FC, McAlery devient à 23 ans le premier capitaine de l'Irlande pour la première sortie internationale du pays, le 18 février 1882. Il évolue au poste d'arrière droit.
Une défaite historique et des larmes Les conditions climatiques sont alors typiques d'un mois de février à Belfast. The Times parle d'un "froid mordant", avec "bourrasques, averses et grêle". Ce jour historique pour le football irlandais est toutefois marqué par la dure réalité de l'écart à ce moment précis entre l'équipe d'Irlande qui vient de voir le jour et celle d'Angleterre. Les Trois Lions, beaucoup plus expérimentés que leurs adversaires du jour, s'imposent 13:0.
The Glasgow Herald écrit : "Tout le monde s'attendait à ce que l'Irlande soit battue, mais pas par 13 buts à zéro". The Sportsman se montre plus encourageant envers les nouveaux venus au football international : "Les Irlandais ne doivent pas être découragés par ce résultat. Viendra un jour où ils pourront rivaliser d'égal à égal. On peut déplorer d'autre part que les Anglais n'aient pas envoyé une équipe un peu moins forte pour cette première confrontation". Celle-ci reste à ce jour la plus large victoire de tous les temps pour l'Angleterre et pour l'Irlande, la plus lourde défaite.
Après cette débâcle, McAlery aurait éclaté en larmes dans les vestiaires. Malgré tous ses efforts pour importer le beau jeu dans son pays natal, il était évident qu'il restait encore beaucoup de travail pour pouvoir rivaliser avec les nations de Grande-Bretagne.
McAlery portera le brassard une seconde fois, pour la deuxième sortie de l'Irlande, contre le Pays de Galles à Wrexham. La défaite sera moins lourde (1:7), mais elle n'en marquera pas moins la dernière apparition de McAlery dans le football international. McAlery décide alors de se concentrer sur l'aspect administratif du football en Irlande. Il œuvre jusqu'en 1888 comme secrétaire de la Fédération irlandaise de football, officiant en même temps comme arbitre international.
Sa carrière avec l'Irlande a donc été courte, avec deux sélections en tout et pour tout, mais on l'a vu, McAlery a été bien plus que le premier capitaine de l'équipe de football de son pays. Il a été la force motrice qui a permis à l'Irlande de découvrir le beau jeu. Si un homme n'était pas tombé amoureux du football lors de sa lune de miel en 1878, l'Irlande aurait peut-être attendu encore longtemps avant de s'adonner aux délices du beau jeu.