samedi 05 octobre 2024, 15:00

Histoires de la Coupe du Monde des sans-abris : une semaine après

  • Le Mexique a remporté les tournois masculin et féminin de la Coupe du Monde des sans-abri de Séoul 2024

  • Le tournoi œuvre pour un monde où il n'y aurait plus de sans-abri

  • Des vies ont déjà changé une semaine seulement après la fin du tournoi

Cela fait une semaine que la 19e édition de la Coupe du Monde des sans-abri s’est achevée à Séoul, en République de Corée, et déjà l’impact social positif qui fait la renommée du tournoi commence à prendre forme.

La Coupe du Monde des sans-abri est un tournoi qui a pour objectif de transformer la vie des participants et changer les perceptions et les attitudes envers les personnes sans abri. La vision de la Homeless World Cup Foundation (HWCF) d’un monde où il n'y aurait plus de sans-abri est plus qu’un simple signal de vertu : c’est un objectif que la fondation atteint année après année grâce au langage universel du football.

De nombreux participants au tournoi depuis 2003 ont trouvé un logement, une adresse permanente et/ou un travail dans des communautés sportives, qui donnent à leur tour les pays pour lesquels ils ont joué. Un véritable impact qui change la vie.

Organisé chaque année, le tournoi est pensé dans ses moindres détails pour permettre au plus grand nombre de personnes possible de bénéficier du travail de la HWCF.

Par exemple, vous ne pouvez participer à la compétition qu'une seule fois dans votre vie. Cela permet de garantir au plus grand nombre possible de personnes la possibilité de prendre un nouveau départ, sachant que 1,2 million de vies de sans-abri ont été aidées depuis le début du tournoi en 2003.

On peut déjà constater que l'édition 2024, le premier tournoi depuis la signature du protocole d'accord entre la FIFA et la HWCF, ne fait pas exception, avec des vies déjà bouleversées.

Felizia Sandberg, ancienne joueuse suédoise devenue entraîneur.

Felizia Sandberg a représenté la Suède à la Coupe du Monde des sans-abri de Santiago en 2014, au Chili. Dix ans plus tard, elle contribue aujourd'hui à transmettre les bienfaits du football à d'autres en tant qu'entraîneuse de l'équipe suédoise.

"La Coupe du Monde des sans-abri m’a sauvé la vie. J’étais aux prises avec une addiction – j’étais accro à l’héroïne – mais quand j’ai joué au Chili, cela a changé ma vie et je suis sobre depuis", a déclaré Sandberg. "Certains de nos joueurs n’aimaient pas le football avant de venir chez nous, mais maintenant ils aiment ça parce que c’est plus qu’un jeu. Le football apporte de l’espoir et de la cohésion."

La mère de Sandberg fait partie de l’équipe suédoise de 2024 qui était à Séoul. Ayant vu l’impact du football sur sa fille, elle a rejoint l’équipe il y a 18 mois et est depuis libérée de la drogue.

Yasmeen Khan, Inde

Yasmeen Khan a grandi à New Seemapuri, le plus grand bidonville de New Delhi, avec peu de perspectives d’avenir sauf celui de suivre le chemin traditionnel des jeunes femmes : se marier et sans pouvoir décider de son propre avenir.

Tout cela a changé lorsque l’organisation indienne Slum Soccer a visité sa région et apporté de l’espoir et du changement par le biais du football.

"Le football a changé ma vie. Dans la région d’où je viens, les familles sont défavorisées et la vie n’est pas très sûre", a déclaré Khan. "On peut voir des petits enfants prendre de la drogue avec des seringues. Les filles ne peuvent pas porter de shorts là-bas, donc c’est très difficile pour moi de venir jouer au football, mais grâce à Slum Soccer, cela a été un énorme changement dans notre communauté. Ils nous ont éduqués grâce au football. Au début, les filles n’avaient pas le droit de sortir, ni de porter de shorts, et ne pouvaient pas sortir sans le voile. Maintenant, les filles portent des shorts et jouent au football. Cela a eu un énorme impact sur notre communauté.

"Cette Coupe du Monde des sans-abri va être un tournant pour moi et ma communauté car lorsque je rentrerai après défendu les couleurs de mon pays, d’autres filles vont s'y mettre à fond. Les parents vont les envoyer jouer en disant : "Si elle peut, pourquoi pas toi ?"

Sandesh Borde, l'entraîneur de Khan

"C’est un miracle pour ces filles qui n’avaient aucun espoir dans la vie. Elles n’avaient rien. Lorsqu’elles viennent ici, elles sont pleines d’espoir, elles sentent toutes qu’elles peuvent faire quelque chose dans leur vie", a déclaré Borde. "Elles deviennent des modèles pour une société où les filles sont tenues à l’écart du sport. Cela est en train de changer et je suis sûr que les joueuses vont apporter de grands changements dans leurs communautés."

Reed Fox, entraîneur, Street Soccer USA

Reed Fox est directeur d'organisation à but non lucratif Street Soccer USA. La Coupe du Monde des sans-abri de Séoul 2024 est sa cinquième à la tête de l’équipe américaine. Pour Fox, le fait que d’anciens joueurs reviennent sans cesse pour aider la prochaine génération de participants est un signe que le tournoi a un grand impact.

"Les sans-abri sont isolés et fortement stigmatisés", a souligné Fox. "Mais ce tournoi montre que cela peut toucher n’importe qui, et que n’importe qui peut en sortir. Le football offre cet exutoire, de la positivité, du collectif et c’est exactement ce dont les gens ont besoin."

"Trois de nos entraîneurs cette année sont d'anciens participants au tournoi, c'est donc une belle expérience riche en enseignements."

Le fait que la FIFA joue un rôle dans le tournoi pour la première fois, selon Fox, apporte encore plus d'enthousiasme à tous les participants.

"Les joueurs sont super heureux : ils ont grandi en regardant la Coupe du Monde et tout le monde connaît la FIFA, donc le fait qu'ils participent au tournoi montre vraiment à quel point c'est important et spécial."

Natalie Handley, arbitre

Le retour des joueurs dans un nouveau rôle ne se limite pas simplement à entraîner. Natalie Handley, elle, est revenue pour faire tomber les barrières en tant qu'arbitre.

A l'origine, Natalie représentait le Pays de Galles comme joueuse à la Coupe du Monde des sans-abri de Santiago 2014. Sa vie a tellement changé avec le tournoi qu'elle se devait de revenir, devenant la première femme arbitre du tournoi (Mexico City 2018) et la première femme à arbitrer une finale (Sacramento 2023).

"La Coupe du Monde des sans-abri est spéciale pour moi, elle m’a sauvé la vie en m'aidant à la remettre sur les rails", a confié Handley. "Elle m’a donné la confiance d'être moi-même. J’adore le football et j’aime voir des gens qui arrivent à changer de vie."

"Vous n’êtes pas juste une personne sur le terrain, vous êtes un joueur. Vous n’êtes pas sans-abri, vous n’êtes pas un malade mental, vous n’avez pas de dépendance à la drogue ou à l’alcool, vous êtes un footballeur et j’adore ça." Carlos Alberto Sanchez Gomez, Mexique

La FIFA a notamment aidé à la Coupe du Monde des sans-abri en diffusant tous les matches sur FIFA+, le service de streaming de la FIFA, permettant ainsi aux gens du monde entier de suivre les rencontres tout en découvrant les histoires des joueurs.

A view of the action during the Seoul 2024 Homeless World Cup

Des joueurs comme Carlos Alberto Sanchez Gomez, du Mexique, n’aurait jamais imaginé qu’il serait diffusé en direct par la FIFA, permettant à ses amis et à sa famille de le suivre, mais aussi d’inspirer des gens du monde entier.

"C’est vraiment incroyable, car on n'imagine jamais que ça puisse arriver. Le football, c’est ma vie. C’était mon échappatoire à la dépendance", a déclaré Gomez. "Qu’y a-t-il de mieux que de représenter mon pays ? Cela change complètement ma vie et cela vous motive à continuer à être un exemple – pour que les jeunes vous regardent et veuillent être comme vous. Être ici a changé ma vie."