L’Américaine a arbitré son premier match à 14 ans, avant de faire carrière dans le marketing
En 2019, alors mère de trois enfants, elle décide de faire son métier de sa passion
Elle sera l’une des trois arbitres américaines présentes en Australie et en Nouvelle-Zélande
Tori Penso a dix ans quand sa mère l'autorise à jouer au football pour la première fois. Mais cette interdiction n'a rien à voir avec son genre. "Elle ne voulait pas me voir revenir à la maison avec des bleus et des écorchures plein les jambes. Moi, de mon côté, je voyais mes deux frères s’amuser avec le ballon et je n’avais qu'une idée en tête : les imiter", explique Penso à FIFA.com.
Future représentante du corps arbitral américain à la Coupe du Monde Féminine de la FIFA, Australie & Nouvelle-Zélande 2023™, Penso reconnaît que sa famille a joué un grand rôle dans son choix de carrière. "Mes frères arbitraient des matches entre équipes locales à Stuart, en Floride, où j’ai grandi. À 14 ans, j’ai dit à ma mère que je voulais gagner un peu d’argent. Elle m’a répondu : ‘Pourquoi tu ne travaillerais pas sur les terrains où tu passes déjà tellement de temps, de toute façon ?’ Alors, j’ai commencé à me faire payer pour arbitrer des matches de filles et de garçons."
La même année, en 1999, l’équipe féminine des États-Unis remporte le titre mondial devant ses supporters. Cet épisode a profondément marqué Penso. "Je revois encore les images de Brandi Chastain qui venait de transformer le tir au but décisif. C’est l’un de mes plus beaux souvenirs. C’était la première fois que je considérais une femme comme une athlète avant tout. Cette victoire a complètement changé ma façon de voir les choses."
À 18 ans, Tori s’achète sa première voiture grâce à l’argent gagné en tant qu’arbitre. En outre, ses performance lui valent de recevoir une invitation pour un stage sur l’arbitrage organisé par le programme de développement olympique au Texas. "Je n'avais jamais quitté la Floride. Je suis encore en contact avec des gens que j’ai rencontrés là-bas", poursuit l'arbitre de 36 ans. "C'est là que j’ai appris à considérer l’arbitrage comme une forme d’art."
Parallèlement, Penso joue au football tout en étudiant le marketing à l’université. À l’époque, elle ne s’imagine pas gagner sa vie en tant qu’arbitre. "Il n’existait pas d’arbitres professionnels aux États-Unis. Ce n’était pas une carrière au sens strict. Néanmoins, j’étais consciente que cette activité représentait plus qu’un simple passe-temps. Je me disais que l’arbitrage me permettrait peut-être d'apprendre à mieux connaître mon pays ou, pourquoi pas, le monde."
Avant de quitter son emploi dans une agence publicitaire pour devenir arbitre à plein temps, Tori fait la connaissance de Chris Penso, qui officie lui aussi en tant qu’arbitre. Ils se marient et ont trois filles ensemble. Tori connaît un nouveau tournant dans sa vie de femme en noir à l’occasion de la Coupe du Monde Féminine de la FIFA, France 2019™, alors qu’elle tient sa benjamine sans ses bras.
"Je savais que je ne pouvais pas tout faire correctement et j’avais le sentiment que des portes commençaient à s’ouvrir pour moi dans l’arbitrage professionnel. Alors, j’ai pris ma décision, avec le soutien de ma famille. Je voulais savoir jusqu’où je pourrais aller. Et j’ai été beaucoup plus loin que je ne l’aurais jamais imaginé. J’ai découvert les histoires de toutes ces femmes sur le terrain. Certaines d’entre elles étaient déjà mères. Ça m’a donné des idées. Je me suis dit : ‘Dans quatre ans, je serai peut-être parmi elles’."
En septembre 2020, elle devient ainsi la première femme à arbitrer un match de MLS depuis plus de 20 ans. "C’était l’un de mes objectifs, il y a cinq ans. J’ai eu énormément de chance de le réaliser et plusieurs fois, même. Désormais, je fais partie de l’organisation des arbitres professionnels de la MLS. Mais ce n’est pas une fin en soi : il faut continuer à travailler et à se tester."
En 2021, Penso entre à nouveau dans l’histoire, cette fois au niveau continental : elle est la première femme à arbitrer et à mener un trio arbitral entièrement féminin dans une compétition masculine de la CONCACAF. En juin, elle devient la première femme à arbitrer un match de qualification pour la Coupe du Monde de la FIFA™. "Je suis fière. Si vous regardez autour de vous, vous verrez que les femmes réalisent des choses étonnantes."
En 2022, Penso dirige cinq matches de Coupe du Monde Féminine U-20 de la FIFA™ au Costa Rica, dont une demi-finale. Avec une telle carte de visite, elle fait désormais l’admiration d’une nouvelle génération... à commencer par ses trois filles. L’une d’entre elles est-elle prête à reprendre le flambeau ?
"Pendant la SheBelieves Cup, elles ont complété une affiche qui commençait par ces mots : ‘Je crois que...’ Ma fille de huit ans a écrit qu’elle serait footballeuse professionnelle, celle de six ans qu’elle jouerait au football et qu’elle ne renoncerait jamais et celle de cinq ans qu’elle deviendrait arbitre. En tout cas, elles pourront compter sur notre soutien !"
Actuellement, Penso partage son temps entre ses obligations d’arbitre et sa préparation pour la Coupe du Monde Féminine. "J’ai des échanges intéressants à la maison avec Chris, qui est aussi arbitre assistant vidéo FIFA. Ça m’aide à voir les choses différemment quand je dois diriger un match."
Penso reconnaît qu'il lui arrive d’éprouver de la nervosité les jours de match. Pour y remédier, elle préfère se concentrer "sur les petits détails, pour progresser chaque jour d'un pour cent et entrer sur le terrain dans les meilleures dispositions". Il sera bientôt temps pour elle de faire ses valises. Un objet en particulier figure tout en haut de sa liste de choses à emporter : "Une photo de famille, qui m’accompagne partout où je vais. Sans mon mari et mes filles, je n’aurais jamais pu accomplir tout ça".