Les Îles Féroé enregistrent 300 jours de pluie par an
L’archipel compte plus de moutons que d'habitants
Jouer au football représente un vrai défi
"Quand il ne pleut pas et qu'il n’y a pas trop de vent, je suis content", avoue à FIFA.com Kevin Schindler, entraîneur adjoint du HB Tórshavn, le club le plus titré du pays. Depuis le début de l’année, l’ancien international junior allemand et pensionnaire du Werder Brême en Bundesliga s’est lancé dans une nouvelle aventure : dompter la nature sauvage des Îles Féroé, où il pleut en moyenne 300 jours par an.
Balayé par les vents de l’Atlantique nord, cet archipel qui regroupe 18 îles bénéficie d’un statut de semi autonomie, même s'il reste techniquement rattaché à la couronne du Danemark. La Betri Deildin, le championnat de première division, a été l’un des premiers à reprendre en Europe, suite à la pandémie de coronavirus. "Les médias se sont intéressés à nous du jour au lendemain. Je n’avais jamais reçu autant de demandes d'interviews !", sourit l'entraîneur. Les dix clubs de l’élite s’affrontent trois fois au cours de la saison pour désigner un champion. "Il nous arrive parfois de voyager pendant deux heures en ferry", poursuit Schindler, qui a également évolué à Cincinnati, aux États-Unis, et à Cambuur, aux Pays-Bas.
L'île aux moutons
Ull er foroya gull ("la laine est l’or des Féroé") : le proverbe local traduit une réalité : avec 80 000 individus, les moutons devancent largement les humains (50 000) sur l’archipel. Rien d’étonnant, donc, à ce que les Îles Féroé soient aussi connues sous le nom "d’îles aux moutons". Mais elles sont aussi devenues au fil des ans une terre de football, au point d’attirer joueurs et entraîneurs professionnels.
En dépit d'un climat parfois difficile, le football jouit d'une énorme popularité. "Ici, tout le monde est très motivé, même lorsqu’il s’agit de s’entraîner", assure le technicien de 32 ans. Le championnat fait relâche entre janvier et avril, ce qui n’empêche pas les joueurs de continuer à s’entraîner en extérieur. "Le vent nous pose plus de problèmes que le froid. La mise en place des ateliers peut vite devenir un vrai casse-tête. Parfois, on croit avoir terminé son installation, mais il suffit d'une rafale pour que tout soit à refaire" , détaille Schindler. "Les joueurs, en revanche, ne semblent pas du tout perturbés. Quelles que soient les conditions, l’entraînement affiche toujours complet."
À ce sujet, le championnat s’est doté d’une règle particulière : lors des phases arrêtées, un joueur est autorisé à tenir le ballon au sol, le vent étant parfois si violent qu’il est impossible que la balle reste bien en place.
Par ailleurs, le championnat n’a pas encore franchi le pas du professionnalisme ; de nombreux joueurs partagent leur temps entre le football et leur métier. Quelques-uns ont la chance de gagner leur vie grâce au ballon mais, pour les autres, il faut parfois jongler avec les obligations. "Dans l’équipe, nous avons des couvreurs, des pêcheurs mais aussi des éleveurs de moutons ou de saumons. Les structures sont toujours en phase de développement, mais nous sommes sur la bonne voie. Nous voulons construire quelque chose ici, notamment avec les jeunes", précise Schindler.
Le HB Tórshavn vise une qualification pour l’UEFA EURO League, ce qui témoigne des nouvelles ambitions de Schindler et de son équipe. Jusqu’à présent, aucune formation de l’archipel n’a jamais réussi cet exploit. Équipe la plus titrée du pays, le club de la capitale compte de nombreux joueurs de la sélection, qui utilise les mêmes équipements pour ses entraînements. Quand l’équipe nationale joue, tout l’archipel répond présent. "Les habitants sont très fiers de leur pays. On sent que tous font corps derrière leur équipe. Aux Îles Féroé, tout le monde se connaît. Il se dégage quelque chose de très fort de cette communauté", juge l'Allemand.
Une surprise pour débuter
En 1990, les Îles Féroé, qui occupent actuellement le 110ème rang du Classement mondial FIFA/Coca-Cola, ont fêté leurs débuts sur la scène internationale en s’offrant une victoire de prestige (1-0) sur l’Autriche. Quadruple championne du monde, l’Allemagne a également peiné pour vaincre la résistance des Îles Féroé sur la route de Russie 2018, avec deux victoires 3-0. De son côté, la sélection féminine, qui figure en 86ème position au Classement mondial féminin, s’est récemment illustrée en atteignant la phase de groupes des qualifications pour la Coupe du Monde Féminine de la FIFA, France 2019™. Cette performance inédite leur a permis de se mesurer à quelques poids lourds continentaux, dont l’Allemagne.
Avec cœur et passion, Les Îles Féroé ont acquis la réputation d’accomplir de grandes choses avec peu de moyens.
Cet article s'inscrit dans notre série "The Global Game" qui met en lumière le football qui se joue habituellement loin des feux des projecteurs.