Erik Hamren dirige l'Islande depuis près de deux ans
L'ancien sélectionneur de la Suède a pris le poste contre l'avis de tous
Il espère qualifier les Strákarnir okkar pour l'UEFA EURO
"Ils m'ont tous dit que j'étais fou", sourit Erik Hamren en repensant à son arrivée sur le banc de l'Islande en août 2018. À l'époque, l'ex-entraîneur de la Suède comprenait les réticences de ses amis. L'Islande était entrée dans les annales en devenant le pays le moins peuplé à se qualifier pour l'UEFA EURO et la Coupe du Monde de la FIFA™, mais elle devait ses exploits à une génération dorée vieillissante. Après le départ de Lars Lagerback et Heimir Hallgrimsson, les artisans des performances de l'équipe, leur successeur semblait condamné à l'échec.
Hamren a pourtant relevé le défi et n'a aucun regret. Malgré un parcours cahoteux dû à une période d'adaptation et à une cascade de blessures, les Strákarnir okkar ont accédé aux barrages qualificatifs de l'UEFA EURO et espèrent s'offrir une troisième participation consécutive à un grand tournoi.
L'épidémie de COVID-19 a reporté à octobre leur demi-finale contre la Roumanie, et Hamren espère faire vivre une nouvelle soirée historique à Reykjavik ce jour-là. Au cours de son entretien avec FIFA.com, il évoque les raisons qui l'ont poussé à accepter le poste, le confinement et son espoir d'ouvrir une nouvelle ère sur la terre de feu et de glace.
M. Hamren, comment avez-vous vécu ces derniers mois ?
Heureusement, toute ma famille est en bonne santé et même si l'absence de football a laissé un grand vide, je ne peux pas me plaindre. Quand je pense à tous ces gens qui souffrent et qui meurent, j'ai conscience d'être dans une position privilégiée. Et les entraîneurs de football sont très adaptables, peut-être parce que nous sommes habitués aux changements fréquents, et nous savons tirer le meilleur parti possible d'une situation. Il y a eu aussi de bons côtés. J'ai passé plus de temps avec ma famille et j'ai perfectionné mon golf. Mais le football m'a beaucoup manqué et j'ai hâte que les compétitions reprennent. Je n'ai pas revu mes joueurs depuis novembre dernier, la pause était donc déjà longue, même avant le confinement. Nous avions planifié les barrages et nous les attendions tous avec impatience.
Vous avez pris les rênes de l'Islande il y a près de deux ans. Quelles sont vos impressions jusqu'ici ?
Excellentes. Ces deux années ont été très enrichissantes sur le plan tant footballistique qu'humain. Les débuts ont été compliqués. Nous avons été confrontés à deux reprises à la Belgique, première au classement FIFA, et nous avons été mis à mal par la France et la Suisse. Mais j'ai appris à connaître les joueurs et la suite des qualifications s'est bien passée. Nous espérions décrocher l'une des deux premières places, jusqu'à ce que la Turquie nous devance. Les barrages seront très durs, mais la différence se fera sur des détails et nous avons toutes nos chances si nous savons rester concentrés.
Vous avez entraîné votre équipe nationale, la Suède, avant de prendre en charge une sélection étrangère. En quoi est-ce différent et avez-vous eu besoin d'un temps d'adaptation ?
Le travail est en grande partie le même, mais il y a quelques différences, comme la langue bien sûr. Même s'il a été assez facile de communiquer en anglais, il m'a fallu m'habituer à entraîner dans une langue étrangère et je suis sûr que cela a demandé un temps d'adaptation aux joueurs également. Mais j'avais officié au Danemark et en Norvège, et j'avais occupé le poste de directeur technique des Mamelodi Sundowns en Afrique du Sud avant d'entrer en fonction en Islande. Je suis convaincu que travailler à l'étranger permet de s'améliorer en tant qu'entraîneur et en tant qu'homme. C'est une éducation au football et à la vie.
Les récentes performances de l'Islande sous la houlette d'un technicien suédois, Lars Lagerbäck, vous ont-elles aidé à être accepté ?
Je crois. Les Islandais ont vécu une belle aventure avec Lars et j'ai la même conception du football que lui, ce qui aide également. C'est sûrement ce que la fédération avait à l'esprit quand elle m'a offert le poste. Je voulais revenir en Europe et le banc me manquait. J'avais conscience de l'ampleur de la tâche. Accéder à deux grandes phases finales relève de l'exploit pour un petit pays comme l'Islande, alors il n'était pas facile de prendre le relais. On m'a dit que j'étais fou d'accepter et que je courais à l'échec. Ce sera dur d'égaler ce que cette équipe a réussi à l'UEFA EURO 2016, puis dans les qualifications pour la Coupe du Monde, où elle a fini en tête d'un groupe relevé comprenant la Croatie, l'Ukraine et la Turquie. Mais le défi m'a enthousiasmé. J'ai pensé : "On peut y arriver."
Beaucoup de joueurs de la génération dorée islandaise sont trentenaires et certains s'approchent de la quarantaine. Vous a-t-il fallu rajeunir l'équipe ?
Je me suis posé quand j'ai pris le poste : ces vétérans possèdent-ils toujours les qualités et la motivation nécessaires pour accomplir de nouvelles prouesses ? Ils m'ont donné toute satisfaction et j'apprécie beaucoup leur comportement. Notre seul problème, que l'entraîneur précédent avait aussi rencontré, ce sont les blessures qui affectent les joueurs clés. Le même onze de départ a été aligné pendant quatre ans et cette régularité a payé. Cela n'a pas été le cas ces dernières années. Gérer les forfaits de plusieurs éléments décisifs en même temps est beaucoup plus difficile pour les petits pays, qui n'ont pas une grande profondeur de banc. Nous avons néanmoins eu ainsi l'occasion de tester de jeunes talents et certains ont su saisir leur chance. L'Islande aura toujours un bel avenir devant elle, une fois cette génération à la retraite.
Vous avez mené la Suède aux deux dernières éditions de l'UEFA EURO. Mais votre plus grande réussite ne serait-elle pas de conduire l'Islande à la prochaine phase finale ?
Probablement, en raison de la taille de ces deux pays et parce qu'on m'avait déconseillé de prendre ce poste. Trois apparitions successives dans un grand tournoi seraient un formidable accomplissement pour un petit pays comme l'Islande. Alors oui, ce serait ma plus grande réussite d'entraîneur.